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A Marseille, la future école primaire sera construite sur une nécropole du Haut Moyen Âge


ARCHÉOLOGIE – Une opération de fouille menée dans le quartier de La Capelette a mis au jour plus de 100 squelettes datés principalement du VIIe – VIIIe siècle.

Il y a quelques squelettes dans les placards du futur groupe scolaire de Marseille dans la ZAC de La Capelette. Ou plutôt, sous les fondations de la future école primaire et du gymnase qui s’agrandiront le long du boulevard Lazer, dans le Xe quartier de la métropole portuaire. Une opération archéologique a mis au jour depuis novembre un ancien site funéraire à l’endroit où s’agrandiront la cour, les vestiaires et les salles de classe. Ce n’est pas seulement une poignée de tombes isolées, mais une nécropole médiévale, pourvue d’au moins 91 sépultures millénaires et peuplée de quelques centaines de restes d’adultes et de squelettes d’enfants.

Selon l’équipe de l’Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap) en charge de la fouille, la nécropole de La Capelette date du Haut Moyen Âge, vers le VIIee et le VIIIe siècle, avec une occupation attestée jusqu’au Xee siècle. Une période qui correspond notamment à l’ère mérovingienne, très peu documentée dans l’histoire du bassin marseillais. « Archéologiquement, il ne reste presque rien de cette période.souligne Nicolas Weydert, responsable de l’opération qui s’est terminée le week-end dernier. De plus, tout ce que nous avons trouvé sur place est vraiment nouveau et d’une importance scientifique primordiale..”

Dénuder la capelette

La fin de l’Antiquité correspond en effet à une période difficile pour le port et son arrière-pays. « Prospère jusqu’à la fin de l’Antiquité, Marseille décline au début du Haut Moyen Âge, au VIIee siècle, explique Nicolas Weydert. Provence tombe sous la coupe des Francs. Au VIIIe siècle, Charles Martel est venu remettre de l’ordre dans la région qui était entrée en dissidence à l’instigation des patrices de Marseille, les potentats locaux de l’époque« .

L’opération de fouille marseillaise à La Capelette a mobilisé 26 archéologues de l’Inrap pendant près de quatre mois. Nicolas Weydert, Inrap

Difficile à dire, avec cette excavation de 2700 m2, si les tourments des premiers siècles du Moyen Âge ont eu bien des échos à La Capelette. Aujourd’hui situé au cœur de la métropole marseillaise, le quartier n’était, il y a plus de mille ans, tout au plus qu’un modeste hameau périphérique, situé à quelques kilomètres du bouillonnant port méditerranéen, autour du centre historique du Panier. Les sépultures examinées par les archéologues de l’Inrap corroborent ce profil rustique. Pas de sarcophages, d’armes sauvages ou de trésors monétaires dans les profondeurs de la ZAC, mais quelques bagues, deux petits bracelets, des boucles d’oreilles en fil de cuivre torsadé, et une plaque d’attache pour les vêtements.

On trouve parfois des squelettes, donc des individus, qui nous parlent plus qu’aux autres et nous saisissent.

Nicolas Weydert, archéologue Inrap et responsable scientifique du site préventif de La Capelette.

Le manque d’ostentation n’a pas découragé la classe primaire venue il y a quelques jours du centre de Marseille visiter le site. Ce modeste cimetière médiéval dépouillé puis fouillé par les archéologues présentait ainsi une silhouette extraordinaire aux yeux des enfants. La présence d’une centaine de squelettes y était pour quelque chose. « La fouille de tombes laisse rarement indifférent !note Nicolas Weydert avec amusement. En archéologie, on peut certes s’habituer assez vite à ce travail et presque laisser s’installer une certaine routine. Mais on trouve parfois des squelettes, donc des individus, qui nous parlent plus qu’aux autres et nous saisissent.

Cité des morts, école des vivants

La nécropole de La Capelette contenait une telle sépulture. Il s’agissait de la première des trois doubles tombes creusées au cours de l’opération. Le fond de la fosse constituait la dernière demeure d’une femme, enterrée avec un enfant – probablement le sien. Les ossements adultes effondrés au fond de l’excavation côtoyaient le crâne ouvert, la mâchoire béante et les petits os d’un mineur. Les examens post-fouille révéleront peut-être ce qui a emporté ces deux individus découverts main dans la main, fixés dans l’éternité par cette dernière caresse. «Il y avait quelque chose de vraiment très touchant dans ce geste intime. évoque Nicolas Weydert.

Fouille d’une tombe d’enfant. Nicolas Weydert, Inrap

Faut-il s’inquiéter de cette nécropole médiévale pour les futurs écoliers de la ZAC de La Capelette ? L’archéologue se veut d’emblée rassurant à ce sujet. Tous les meubles et restes humains ont été enlevés, même mes ossements réduits – comprenez des squelettes entassés dans un coin de leur tombe pour faire place à de nouveaux occupants. Le reste du site funéraire devait être détruit avec la pose des fondations du groupe scolaire, dont la construction avait été retardée pour laisser le temps aux chercheurs de travailler. « Après, oui, c’est un peu un cimetière indien à Poltergeist, concède Nicolas Weydert. En tout cas, les enfants qui ont visité le site n’ont pas eu peur. Mais cela peut être différent pour leurs parents !

Prescrite par la direction régionale des affaires culturelles (Drac) d’Occitanie, l’opération de fouille marseillaise de La Capelette a mobilisé 26 archéologues de l’Inrap pendant près de quatre mois. Outre le cimetière mérovingien, les chercheurs ont également mis au jour un « quartier protohistorique », daté de l’âge du bronze, vers 1400-1300 av. J.-C., et qui concentrait à la fois les fonctions funéraires, artisanales et domestiques. Porté par la société locale d’équipement et d’aménagement de la métropole (Soleam), le projet d’un nouveau groupe scolaire à La Capelette devrait voir le jour au premier trimestre 2025.

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