La violence contre les parents en hausse, les experts inquiets

Les homicides domestiques sont une tendance inquiétante à surveiller, avertissent les experts, car les cinq victimes de meurtre jusqu’à présent cette année à Montréal auraient été poignardées par un jeune membre de la famille.
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« Le triple meurtre dans Rosemont est déjà le troisième parricide depuis janvier. On voit une tendance à la hausse qui se dessine, l’importance de se pencher un peu plus sur ce type de meurtre », explique Dre Suzanne Léveillée, psychologue spécialisée dans les homicides intrafamiliaux.
Selon une revue du Journal, cinq personnes ont été tuées dans un « parricide » sur l’île de Montréal depuis le début de 2023. Ce type d’homicide, par exemple, se caractérise par le meurtre du père ou de la mère.
L’an dernier, sept personnes ont été victimes de ce type de crime à travers la province. Cette apparence de tendance haussière fait sourciller les experts.
« C’est vrai qu’il est moins fréquent de voir des parricides que des féminicides, mais ça arrive. C’est un phénomène qui s’observe et qui est souvent lié à un problème de santé mentale », souligne le Dr Ghayda Hassan, psychologue.
Santé mentale
La santé mentale est aussi au cœur de tous les parricides présumés commis depuis le début de l’année.
Emmanuel Gendron-Tardif, un cinéaste de 28 ans, a été déclaré inapte à comparaître après avoir prétendument poignardé sa mère à mort dans un appartement de la rue Fullum à Hochelaga en janvier dernier. Il devrait être de retour devant le tribunal le 28 mars, après avoir passé 30 jours en évaluation à l’institut Pinel.
Amel Benali, 26 ans, est soupçonnée, mais toujours pas inculpée, d’avoir tué sa mère en février dernier dans leur appartement de Parc-Extension. Elle reste pour le moment à l’Institut Pinel pour évaluer sa responsabilité pénale. Elle devrait revenir au tribunal le 22 mars.
Arthur Galarneau, 19 ans, a été accusé du meurtre non prémédité de ses parents et de sa grand-mère dans un duplex de Rosemont vendredi matin. Malgré son apparition le lendemain, on ne sait toujours pas s’il sera évalué psychologiquement. Selon ses proches, le jeune homme serait toutefois médicamenté pour des problèmes de santé mentale.
Pour la Dre Léveillée, il est important de distinguer les différents types de parricides liés à la santé mentale, ce qu’elle appelle des « sous-groupes ». Environ 40% des auteurs de parricide tueront dans un état délirant ou psychotique, explique-t-elle.
« En revanche, 60 % de ces personnes vont tuer à cause d’autres problèmes psychologiques et qui ont un déficit de contrôle des impulsions. Ça peut être à cause de conflits familiaux qui n’ont pas été nommés ou d’une rage accumulée », ajoute la psychologue.
Sensibilisation
Selon le Dr Pierre Faubert, psychologue spécialisé dans les « drames familiaux », un programme de sensibilisation à la santé mentale devrait être implanté dans les classes du secondaire pour tenter de contrôler le problème à sa source.
« Je ne parle pas ici d’un cours magistral, mais d’un cours sur la santé mentale qui serait au programme comme tous les autres cours, et qui favoriserait les échanges entre étudiants. L’enseignant pourrait alors aborder des sujets comme le triple meurtre à Rosemont dans un environnement sain et contrôlé », pense le médecin.
Dr Hassan, elle, estime que la société n’est pas encore prête pour ce genre de cours dans les écoles. Elle suggère plutôt de concentrer les efforts sur la formation des intervenants en santé mentale et sur l’accessibilité des soins.
« Faire une formation comme celle-ci dans les écoles sans offrir un accès facile aux soins de santé mentale ne fera qu’augmenter la souffrance des adolescents », souligne la psychologue.
Quant au Dr Suzanne Léveillée, elle pense qu’une nouvelle étude sur les homicides intrafamiliaux, et les parricides en particulier, est nécessaire.
« Toute la question de la violence envers les parents, nous n’avons pas encore beaucoup travaillé là-dessus. Maintenant que nous constatons une tendance à la hausse, nous devons nous pencher sur ce type de crime », dit-elle.
cycle de la violence
Le Dr Pierre Faubert doute que la situation s’améliore.
« Notre culture est ancrée dans la violence alimentée par les réseaux sociaux. On se croit imperméable à tout ça, jusqu’à ce qu’on éclate parce qu’on a accumulé trop de violence à l’intérieur », explique-t-il.
Ainsi, plus il y a d’événements violents, plus les gens accumulent la rage et plus les chances qu’une escalade de la violence se produise sont grandes, pense le psychologue, comparant ce cycle de violence à un « cercle vicieux ».
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