Les « frères plumes » Gaël Faye, Ben Mazué et Grand Corps Malade électrisent la Salle Pleyel

NOUS Y ÉTIONS – Le trio de slameurs a défendu l’album pour la première fois ce week-end De courte durée, le résultat d’une aventure à trois. Les plaisanteries fusent et embarquent un public acquis, l’alchimie opère.
Les yeux émus de Gaël Faye ne trompent pas lorsque les premières notes s’envolent. « Un air fredonné dans sa chambre ou sous un abribus, les mots qui s’invitent et s’inventent, pas besoin de beaucoup plus ». Joie de retrouver la scène. Mais trois cette fois. « N’avoir besoin de rien, sauf de mes rimes et de mes frères de plumes », poursuit la chanson, tandis qu’à ses côtés, Grand Corps Malade et Ben Mazué prennent le relais, envoûtant la salle avec leur célèbre titre à trois, Besoin de rien.
La complicité de ces artistes multi-récompensés électrisera pendant deux heures la Salle Pleyel, où ils ont défendu pour la première fois leur EP ce vendredi soir. De courte durée, fruit d’une collaboration inédite. Le public, familial, a bravé la grève – jeunes, retraités et bambins de toute la France, même de Belgique. La salle bondée bourdonnera en chœur toute la soirée. Chacun a son préféré, mais la chimie fonctionne.
« Le Federer de la musique d’amour »
Un clip ouvre la soirée pour raconter l’aventure. Le projet, aussi simple que singulier, est né d’un SMS d’un soir. Les gars, lance Fabien Marsaud alias Gros corps malade, ne nous couperions-nous pas quelque part, loin du bruit, pour mêler nos plumes et nos voix ? À peine dit que c’était fait. Une étape de côté, huit jours dans le cadre idyllique d’un atelier provençal, La Fabrique. Le film dévoile un coin de la genèse des textes, des mots pris à la volée, une blague, un vers, un air fredonné. L’EP de sept titres, sorti en septembre, s’est déjà vendu à 70 000 exemplaires.
Un an plus tard, voici les trois voleurs sur scène, plus complices que jamais. Les crampons fusent. Ben est une cible de choix – comme pour lui faire payer un public particulièrement acquis ce soir. Gaël fait semblant de s’inspirer de ses hanches sur scène. « Toi, Ben, dans 90% de tes chansons, tu parles de deuil et de divorce »tance Grand Corps Malade, reconnaissant toutefois que son ami reste le « J’aime la musique Federer ». La salle rigole, la complicité s’installe.
Ben Mazué et Gaël Faye Salle Pleyel, le 10 mars 2023. Le concert filmé en direct à la Salle Pleyel sera diffusé le jeudi 16 mars dans plus de 200 salles en France, Belgique, Suisse et Luxembourg. Caroline Bazin
Dans un croisement parfait, les trois slameurs alternent des titres communs avec ceux de leur propre répertoire. « Il fut un temps, j’aurais rêvé que toi seul écoutais ma chanson. Et là, vous n’avez qu’à le chanter !lance, sincère, Ben à Fabien qui vient d’interpréter son célèbre je t’aurai beaucoup aimé. Après avoir fait « se balancer » public, Gaël se met au clavier pour accompagner Grand Corps Malade. Plus tard, le troisième arpège de la mélodie de guitare de Dimanche soir.
Gaël l’ambianceur, Ben le ténébreux, Fabien le sage
Gaël s’éclate visiblement. Il mène la danse et hisse sur scène une vingtaine de fans au septième ciel – il faut le dire, tous féminins. Ça bouge sur le son électro de Boomer. Mais où est passé le Franco-Rwandais ? Il s’est fondu dans la fosse, au milieu du public. Content.
« Ben le ténébreux, Fabien le sage, Gaël l’ambianceur », résume un spectateur. L’émotion revient pendant un moment suspendu : sous mes paupières, souvenirs d’enfance au piano-voix qu’ils récitent dos à dos. Que trouve-t-on sous leurs yeux fermés ? Provence pour Ben Mazué, Saint-Denis pour Grand Corps Malade, Paris après l’exil pour Gaël Faye. Derrière, les huit musiciens de l’orchestre font résonner leurs cuivres et leurs guitares. On reconnaît aussi les deux compositeurs de l’Instant, Guillaume Poncelet au piano et Quentin Mosimann au clavier. quand sonne derrière le brouillardce dernier, également auteur de Dames de Grand Corps Malade, attrape le micro et fredonne le refrain.
Il règne ici une ambiance familiale. A la fin du concert, l’un des auteurs du clip de Qui a kidnappé Benjamin Biolay fume une cigarette sur le trottoir. Dans ce titre de fiction loufoque, les trois chanteurs font semblant de régler leurs comptes avec le lauréat des Victoires de la musique 2021… Pierre Nouvel a donné vie aux dessins de Charlotte Mo, et le clip animé a accompagné ce soir les voix des chanteurs. Comment s’est passé le projet à trois ? «Un pur kiff, bien sûr», raconte Pierre Nouvel, qui était au lycée avec Ben Mazué.
Les trois interprètes de l’EP Éphémère ont donné trois dates les 10, 11 et 12 mars à Paris. Caroline Bazin
Pas de doute, la symbiose de la vibe africaine de Gaël, du phrasé de Fabien et des mélodies de Ben a conquis. « Chacun à sa place, chacun différemment »commente un fan à la sortie. « Ils ne surjouent pas, c’est simple et c’est vrai, ajoute une quarantaine. On n’a pas le sentiment d’assister à leur vingtième Zénith« . Dites adieu à la routine et au désenchantement pour une bulle enchantée. Aussi précieux que« de courte durée ».
Le concert, filmé en direct à la Salle Pleyel, sera diffusé le jeudi 16 mars dans plus de 200 lieux en France, Belgique, Suisse et Luxembourg.
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